“Pervers Narcissique”, c’est un terme à la mode depuis dix ans, tellement fourre-tout qu’on finit par le confondre avec un sac à main. Es-tu vraiment aux prises avec un requin-vampire qui te suce ton âme parce qu’elle est trop bonne, ou Tinder t’a juste livré un poney grincheux à qui tu sais pas dire non parce que c’est un mot compliqué ? Et va savoir que c’est pas toi, le P.N. ! Eh ouais, c’est comme les fachos et les cons, ils se reconnaissent jamais comme tels.
“Pervers narcissique” est un terme aussi à la mode que le mojito depuis une dizaine d'années, c’est l’OVNI de la psychologie moderne : on en voit partout, mais les preuves de leur existence ressemblent souvent à des photos floues dans la brume.
Disons qu’il y a autant de gens qui voient des pervers narcissiques non-dépistés autour d’eux que de mères qui pensent que leur gamin est HP sans passer de test de QI.
Alors, déjà : “pervers narcissique”, ça existe pas en psychiatrie. Ils disent “trouble de la personnalité narcissique”, comme c’est noté dans le DSM-5 (C'est le bouquin dans lequel les psys répertorient les gens officiellement cinglés).
Mais les vrais cas sont très rares : le pote qui t’a piqué la dernière bière du frigo ou le voisin qui se gare sur ta place de parking, c’est pas des PN [pervers narcissique], c’est juste des RB [Relous de Base].
L'étiquette “pervers narcissique” est tellement utilisée qu'elle pourrait se coller sur ton chef qui te demande de bosser, le livreur qui laisse un avis de passage alors que t’es là, ou même ton grille-pain quand il crame tes toasts. À ce tarif là, tes plantes sont mortes desséchées parce qu’elles te voulaient du mal, et pas du tout parce que t’as oublié de les arroser.
Regarde ta tronche dans la glace : si t’as l'impression que ton sourire peut couler à la première averse, c'est peut-être le moment de t'acheter un parapluie avant de traiter les météorologues de pervers narcissique, tu crois pas ?
P.N., c’est vraiment la carte-joker que tu peux brandir à toute occasion, c'est comme l’apéro : personne s’y oppose jamais, mais quand t’as tellement la gueule de bois que t’oses pas te raser parce que t’as peur de faire des copeaux, c’est quand même plus de ta faute que celle de ton ami, là, Jacques Daniel.
On dirait que “pervers narcissique”, c'est le synonyme parfait de “méchanceté du monde”; ça s'applique aussi bien à la voisine qui marche avec ses talons au dessus de ta tête après 22h qu'au videur qui t’a recalé de la boîte parce que t’as pas la gueule de l'ambiance à l'intérieur.
Et le problème avec la banalisation de ce terme, c'est qu'on ne croit plus personne quand on crie “au loup” ! Et pourtant, les vrais salopards, ils existent vraiment.
Faut différencier le chien du loup : est-ce que ton date Tinder concerne un yorshire perdu qui cherche une nouvelle maitresse ou plutôt un loup-garou psychopathe déguisé en mouton qui va te déchirer en deux les jours pairs et s’en excuser en pleurant les jours impairs ?
Quand il pénètrera ton intimité pour repeindre les murs de ton cœur, mais que t’as pas osé lui dire que t’aimais pas la couleur, demande-toi si c'est parce que tu étais face à un vrai manipulateur toxique qui t'a mis le pistolet à peinture sur la tempe, ou si c’est pas juste parce que dire “non”, ça te donne des crampes à la mâchoire ?
Le plus difficile, c'est de reconnaître le créateur du problème, parce ce qu’un des pires numéros de passe-passe du pervers narcissique, c’est de te retourner la charge de la responsabilité sur ta gueule, comme si le problème, c'était toi, alors que tes problèmes à toi sont arrivés en même temps que lui, comme par hasard.
Soyons honnêtes, on planque tous en nous quelque part un petit salopard en mode veille : allez, maisavoue que t’as déjà simulé un rire social ou autre chose, trouvé une excuse bidon pour refuser une invitation ou prétendu que t’étais malade pour pas aller bosser !
Toi, tu t'emmêles déjà les pinceaux parce que tu as déjà un peu honte d’essayer de faire passer une demi-vérité avec un tuto youtube, mais le vrai pervers narcissique, il dirige une école de mentalisme, et il va te faire culpabiliser de pas lui fournir les fonds nécessaires pour doubler sa taille.
Les véritables pervers narcissiques, c’est comme les fachos, les coupables et les cons, il ne se reconnaissent jamais comme tels. Pour eux, même les miroirs sont des menteurs.
Du coup, la bonne nouvelle, c’est que le simple fait de te demander si t’es pas toi-même un pervers narcissique signifie probablement que t’en es pas un.
Le vrai PN, c’est un vampire qui suce le sang de ses victimes qui leur sert de carburant exclusif pour permettre à leur égo affamé de survivre. Leur business plan consiste à exploiter leurs victimes comme des chiffons jusqu’à ce que la poussière ne laisse même plus deviner leur couleur originelle. Ah ben oui, ils ont besoin d'une proie sinon c'est comme des requins dans une piscine vide : ils font de mal à personne mais ils meurent de faim et même si de loin, ils sont mignons comme des dauphins, c’est jamais une bonne idée de plonger vers eux, parce que l'aileron qui dépasse, c'est quand même un sacré red flag.
Fréquenter un authentique pervers narcissique, c'est faire de ta vie amoureuse un mélange de Lost et de Koh-Lanta, alors que tu t'étais juste inscrite à une balade romantique; tu auras en permanence le coeur criblé des épines des bouquets de roses qu’il t’a offert à chaque fois comme un colis piégé.
Quand ta mère, ton psy et même ton chat te supplient de sauter de l’avion en vérifiant à peine ton parachute, tu dois commencer à te demander si rester est encore une option. “Mais peut-être qu’il va changer !”.
Attendre d'un PN qu'il change, c'est espérer que l'Everest s'évapore de lui-même pour éviter de mettre les amoureux de la montagne en danger.
Négocier avec un pervers narcissique, c'est un peu comme demander au gardien de prison d’ouvrir la porte pour te permettre de t’évader alors que sa raison d'être à tes côtés est justement de t’en empêcher.
Si le monstre que t’as mis dans ton lit paraît encore plus inquiétant que ceux que tu imaginais dessous quand tu étais enfant, c'est peut-être le moment de faire le ménage dans tes cauchemars, tu crois pas ?
Bon, alors ? … Est ce-que tu as toujours rêvé d'une licorne, mais le père Tinder ne t'a livré qu'un poney grincheux, ou bien t’es aux mains d’un bourreau professionnel qui t'enferme tous les jours dans une lessiveuse à sentiments ?
Auteur du texte et acteur : Michel Defawes (le Black Coach)
Montage : Michel Defawes
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