L'opinion personnelle du Black Coach : moi, je pense que je conserverai l’anonymat. Je donnerai mon sang raisonnablement, et je choisirai les enfants malades des familles les plus riches : ma dose de sang nécessaire à la guérison de leur enfant leur coûtera la quasi-totalité de leur fortune (en leur laissant de quoi vivre normalement). De cette somme cumulée, je garderai une petite partie, me permettant de vivre confortablement sans travailler, et je donnerai le reste à des entreprises et des organismes qui oeuvrent dans la recherche médicale et dans la distribution de médicaments, pour soigner un maximum de victimes d’autres maladies. Maintenant, c’est théorique… Va savoir ce que je ferais en vrai...
Est ce que ton comportement personnel est plus éthique que celui d'une multinationale ?
On va regarder ça ensemble. Cette vidéo est en deux parties. Je vais d'abord te décrire une situation réelle, et ensuite, je vais te confronter à toi-même.
Le médicament le plus cher du monde s’appelle le “Zolgensma” .
Il est produit par Avexis - une filiale de la multinationale pharmaceutique suisse “Novartis”.
Ce médoc très spécial permet de guérir une tare génétique : l’atrophie musculaire spinale.
Cette maladie rare est provoquée par la mutation d’un gène responsable du bon fonctionnement des muscles : ne pouvant pas être normalement sollicités, ils fondent, y compris ceux liés à la respiration, provoquant ainsi une mort à court terme.
Le Zolgensma fournit une nouvelle copie du gène déficient, et permet alors aux nourrissons de grandir et vivre normalement.
Le plus fort, c’est qu’il suffit d’une seule injection pour guérir définitivement, avec un taux de succès avoisinant les 100%.
Seulement, cette petite piqûre coûte deux millions de dollars par personne.
Parce que ce traitement basé sur la manipulation du génome humain est spécifique à chaque enfant. C’est long, compliqué, et ça exige de colossales ressources humaines et techniques.
Entre le tarif stratosphérique et la complexité de l’élaboration de ce remède, y’en aura pas pour tout le monde.
Du coup, Novartis a décidé d’offrir le Zolgensma à 100 bébés dans le monde
Cet élan de générosité sans précédent se marie avec un épouvantable cas de conscience : qui va bénéficier de ce… droit de vivre… car il y a entre 15 et 20’000 cas recensés chaque année sur la planète.
Novartis a opté pour ce qui leur semblait être le moins pire de tous les choix : la loterie.
Je te connais pas, mais peut-être que tu viens de bondir de ta chaise, comme Agnès Buzyn , qui a tweeté : ”Le principe de tirage au sort pour accéder à un traitement ne correspond pas aux valeurs de notre système de santé, qui vise un égal accès aux soins pour tous.”
T’as peut-être envie de hurler contre "Big Pharma". Mais attention : si Novartis se fait défoncer par l’opinion publique, la prochaine fois qu’ils découvriront un traitement similaire, ils le foutront peut-être directement à la poubelle.
Dans l’histoire, le truc qui m’interpelle vraiment, c’est le tirage au sort.
On va mettre de côté Novartis et le Zolgensma.
On va parler de toi, personnellement, dans une situation imaginaire, un monde parallèle dans lequel ton sang est exceptionnel et non reproductible. Tu es la seule personne au monde à pouvoir guérir des nouveaux-nés d’une maladie mortelle particulière juste en lui transférant dix centilitres de ton sang.
Mais même si tu donnes le maximum que ton corps permet, tu ne pourras sauver qu’un enfant sur 50. Un comité médical d’éthique juge que tu as les pleins pouvoirs sur ton sang : tu peux refuser de le donner, ou juste un petit peu, ou t’en faire tellement prendre que t’as même plus l’énergie de sortir de ton lit. Libre à toi de rester anonyme ou pas.
Mais tu devras déterminer les bébés qui auront le droit de vivre, selon les critères de ton choix, ou les tirer au sort, ou si c’est trop dur, déléguer quelqu’un qui décidera à ta place.
Ce sera aussi à toi de fixer le tarif, puisque c’est ton sang.
Tu as même le droit de varier les prix à la tête du client.
Alors, tu ferais quoi dans cette situation ?
Ce dilemme peut s'apparenter au "Choix de Sophie", Ainsi qu'au dilemme du tramway.
Reuters (Anglais) - La loterie
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Approbation du Zolgensma par la FDA (Anglais)